Sprint belge: Cédric Motieh et François Gourmet collaborent désormais ensemble

JOURNAL DE BORD D'UN ATHLÈTE

Réalisé par Trackandmemes, le 11 janvier 2024

On avait déjà rencontré Cédric Motieh une première fois dans le Magazine, le décrivant comme étant l’athlète qui choque les anciens. D’ailleurs, ce samedi 6 janvier à Louvain-la-Neuve, il explose son record personnel sur 60 mètres pour afficher une toute nouvelle performance de 6 secondes et 86 centièmes, classée actuellement 5e performance U20 au niveau européen pour cette saison indoor.

Mais récemment, Cédric n’a pas uniquement connu une fulgurante progression… Il y a eu du changement, également. Une nouvelle collaboration avec un coach que la Belgique connaît déjà, François Gourmet.

L’athlète Cédric Motieh et son coach François Gourmet


Commençons par ton changement de coach, Cédric. Cette décision est due à quoi ?

L’une des premières raisons qui expliquent mon transfert chez François, est que j’ai ressenti le besoin de changement durant la saison précédente. Je sentais que ça faisait un moment que je n’exploitais pas mon plein potentiel durant mes séances d’entraînement. J’avais l’impression de tourner en rond, comme s’il me manquait quelque chose.

J’avais envie de plus, mais je n’arrivais pas forcément à le faire comprendre à mon ancien entraîneur, car la communication n’était pas idéale.

Ce qui, d’ailleurs, me frustrait énormément. Et ça a fini par influencer mes performances.

Ça a été un choix énormément réfléchi, mais un choix qui, pour moi, était logique.

Désormais, quelle est ta nouvelle vision ? Enfin… À toi et ton nouveau coach, François Gourmet ?

En ayant choisi François comme coach, j’ai eu envie de voir plus loin. Un entraîneur de carrière, je l’espère. Quelqu’un d’aussi motivé que moi, et avec qui la communication n’est pas un problème ou un frein. C’est cette vision à long terme que j’ai envie de garder à l’esprit.

Comment se passaient tes entraînements avant, très concrètement ?

Tout se passait plutôt bien durant plusieurs années. Mon programme était cohérent et varié. Mais ça a commencé à être de moins en moins le cas.

Je progressais saison après saison, mais pour que cela continue, j’avais besoin d’un meilleur encadrement. Le plus compliqué a été la saison dernière. Car, en plus de mes entraînements individuels, il y avait également les entraînements de relais pour les championnats d’Europe u20. Je me suis retrouvé dans une situation où je devais gérer mes différents entraînements, et mes cours puisque j’étais encore en rhétorique. J’étais épuisé mentalement, car, comme dit plus haut, sans communication avec son coach, c’est très compliqué d’y arriver.

Et comment décrirais-tu la communication que tu as actuellement avec ton coach ? Quel genre de relation avez-vous?

François est quelqu’un de très ouvert. Je suis souvent étonné de voir à quel point il est dévoué à ses athlètes. Il sait s’adapter à chacun d’entre eux. On communique sans souci. Je suis très content de pouvoir travailler avec lui.

François Gourmet, ces deux dernières années, certains athlètes ont décidé de venir évoluer à tes côtés, notamment Callie Nzukou qui a un record en 11’’62 sur 100 mètres, et maintenant Cédric qui est sans aucun doute très prometteur. Que mets-tu en place pour que la progression de tes athlètes soit des plus favorables ?

Je mise beaucoup sur la communication et l’écoute. Par exemple, avec Callie, on discute beaucoup via WhatsApp, ce qui me permet d’individualiser au mieux l’entraînement. On n’entraîne pas une épreuve, on n’entraîne pas le 100 mètres en se disant que pour courir le 100 mètres il faut effectuer tel programme ou tel programme. Bien sûr qu’on peut s’inspirer de programmes, mais Marine et Callie, par exemple, ont une façon de s’entraîner qui est fort différente, car elles ont des qualités différentes. Ce qui fait aussi la différence, c’est la confiance qu’a l’athlète en son coach. Et s’il y a de la communication, alors il y a plus de confiance. C’est important que l’athlète n’ait pas peur de parler à son entraîneur.

Marine Jehaes, athlète de François Gourmet, spécialisée sur 100m et 200m

Comment adaptes-tu les séances ?

Si l’athlète est fatigué, je peux très vite enlever une séance d’entraînement. Je ne vais pas forcer les choses. C’est mieux qu’il se repose pour que l’entraînement puisse être favorable.

Et au niveau de l’organisation des plannings d’entraînement ?

Je connais les horaires d’examens de tous mes athlètes. Je sais quels jours je peux les entraîner sur la piste, quels jours ils peuvent s’entraîner à la maison, et quels jours ils ont demandé à avoir du repos. C’est avec cet échange qu’on essaie d’optimiser au mieux l’entraînement. Je ne place pas de jours spécifiques pour l’entraînement de course, par exemple, ou pour l’entraînement de musculation. C’est différent pour chaque athlète.

Maintenant, lorsqu’on a un groupe d’athlètes, on ne peut pas tous les séparer. Donc j’essaie de m’arranger pour qu’ils arrivent à se retrouver durant certaines séances. Mais l’objectif premier est de faire un programme qui est défini pour l’athlète de manière précise et individuelle. Je mets également en place un programme de renforcement que l’athlète doit faire chez lui pour éviter les blessures.

Cédric, en parlant de scolarité… Au niveau de tes études, tu nous confiais dernièrement vouloir entrer dans le milieu médical. Comment ça se passe à ce niveau-là ? Arrives-tu à gérer correctement tes cours avec les entraînements ?

Je fais des études de kinésithérapie à la HEPL à Liège. Être étudiant-sportif et devoir s’entraîner au moins cinq fois par semaine, ce n’est pas évident. Mes journées sont très longues et bien remplies. Mais je sais qu’avec François, si ça coince à un moment donné, il y aura toujours moyen de s’adapter. Pour que les deux fonctionnent, il faut trouver des arrangements et mettre en place certaines choses.

Avez-vous un objectif bien spécifique pour cette saison ?

Oui. Nous en avons défini plusieurs en début de préparation. Les objectifs seraient d’améliorer tous mes records personnels et ma technique de course. Mais on ne se met pas de pression. Je garde en tête qu’il faut toujours un temps d’adaptation lorsqu’on change de coach. Même si un de nos objectifs a déjà été atteint sur 60 mètres en ce début du mois de janvier au championnat provincial, à Louvain-la-Neuve.

Cédric Motieh lors des championnats provinciaux (2024)

Et toi, François, as-tu un espoir un peu particulier pour le futur ?

Pour Cédric, j’aimerais qu’il s’épanouisse dans l’athlétisme. Qu’il puisse profiter de ses qualités, de son talent. Qu’il soit heureux de venir à l’entraînement, d’aller en stage, ou même de faire des compétitions.

Mais si je devais donner un souhait me concernant… J’aimerais continuer de vivre de ma passion. Entraîner des sprinters spécialisés sur 60m, 100m, 200m et 400m, et même 400m haies. Je travaille un jour par semaine chez Décathlon. Le reste du temps, je suis payé en partie par le club de Seraing, mais je vis également des bourses de Julien et Robin. Comme ce sont des sportifs de haut niveau salariés, ils ont une bourse pour leur encadrement, donc pour le coach. Mais ils ont également une bourse pour tout ce qui est stage, kinésithérapie, frais de kilomètres… 

Comme Julien se rapproche de ses 32 ans et que Robin a déjà 30 ans, ils ne leur restent plus beaucoup d’années de carrière. J’aimerais essayer de retrouver un groupe ou au moins un autre athlète de haut niveau pour pouvoir continuer de vivre de ma passion. Et si possible, poursuivre ce projet athlétique à Seraing. Un hall intérieur est en train d’être construit juste à côté de la piste. S’il y a la possibilité de construire un centre de sprint, ça pourrait être intéressant pour moi dans le futur…

Sur quels aspects penses-tu faire la différence en tant que coach ?

Je n’utilise pas beaucoup le chronomètre. Bien sûr, lorsque ce sont des séances où l’athlète fait de longues distances, je donne tout de même une fourchette. Mais je ne vais pas m’amuser à chronométrer tous les sprints, car je préfère me concentrer sur la technique.

En termes de répétitions, je ne mets pas beaucoup de volume. Si l’athlète fait six starting-blocks sur son entraînement, je considère que c’est déjà beaucoup.

Et pour ce genre d’entraînement axé sur le sprint, je ne prends pas de récupération. L’athlète part quand il se sent prêt. Je peux donner quelques minutes de plus si je souhaite revoir de la qualité, au point même d’enlever une ou deux séries sur ce qui était prévu.

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