Réalisé par Trackandmemes, le 20 avril 2023
Ça fait quelques années maintenant que je fais du sport. Je pratique de la course à pied assez fréquemment, mais depuis peu, je ressens tout le temps le besoin de faire pipi. Et lorsque ce besoin arrive, il est directement pressant ! Je dois y aller tout de suite…
Je n’ai pas directement pensé que ce problème pouvait être lié à ma pratiquement sportive. Jusqu’à ce que j’en parle à Cédric Danniau, médecin du sport.
Qui êtes-vous, Cédric Danniau ?
Je suis un ancien athlète amateur à la forestoise, médecin du sport depuis 6 ans, et travaillant entre autres pour la LBFA (Ligue Belge Francophone d’Athlétisme).
Pouvez-vous identifier mon problème ?
Lors de la pratique régulière de sport avec impacts (comme les sauts en longueur, sauts en hauteur, triple saut, trampoline, volley-ball …) ou encore la course à pied, on peut observer une augmentation des chocs, et donc l’accumulation de la pression sur le plancher pelvien et sur la vessie.
Dans les sports comme le cross fit ou le soulever d’altères, c’est la majoration de la force des abdominaux qui entraine une augmentation de la pression, soit sur le plancher pelvien, soit sur la vessie.
L’athlète peut alors être alors confronté à deux cas ; dans le premier cas, l’athlète sera moins capable de retenir les urines via une fragilisation du sphincter, qui referme le méat urinaire. Et dans le deuxième cas, l’athlète aura envie d’uriner plus souvent ou en urgence.
On peut donc distinguer l’incontinence urinaire d’effort (perte d’urine durant l’effort) et l’incontinence urinaire par urgenturie (envie de faire souvent pipi et rapidement).
Quels sont les différents symptômes ?
Les symptômes peuvent aller d’un inconfort lié à l’impression de devoir faire pipi de manière urgente, jusqu’à la perte d’urine dans les survêtements lors de l’effort, et même ensuite dans la vie de tous les jours.
Dois-je diminuer ma pratique sportive durant le traitement, ou en attendant d’avoir un traitement afin d’éviter une aggravation ?
La cause de l’incontinence urinaire d’effort (Stress urinary incontinence) est grossièrement due une faiblesse du plancher pelvien (ensemble des muscles qui forment un « hamac » autour de l’anus, du vagin et de l’urètre chez la fille…). Elle est causée par une diminution du rapport de force des muscles pelviens/ abdominaux. Les muscles abdominaux, qui sont plus forts grâce à la pratique du sport, poussent sur le plancher pelvien entraînant un affaissement de celui-ci.
Dans un premier temps, on va proposer à l’athlète de ne pas trop boire avant sa pratique sportive. On peut aussi lui proposer de porter des vêtements sombres afin de camoufler les pertes d’urine éventuelles et de diminuer le stress engendré.
Ensuite, on va réaliser un renforcement et relâchement des muscles du plancher pelvien vu que l’incontinence d’effort est en général consécutive à un déséquilibre des forces Abdomen/Plancher.
Le biofeedback peut également être mis en place en kiné uro-génitale. Il s’agit de prendre conscience des muscles qui ferment la sortie de la vessie et de les renforcer. Un calendrier avec les horaires des mictions sera également proposé.
Enfin, si tous ces traitements sont un échec, un traitement médical voir chirurgical peut être envisagé.
Y a-t-il des praticiens spécialisés pour résoudre ce genre de problème ?
Tout d’abord, il faut informer les patients. Cela passe par l’éducation. Le but est de faire connaître le problème afin qu’il ne soit plus méconnu . (Comme avec cet article)
L’information peut venir d’articles et de podcasts, ou du corps médical.
Des thérapeutes, comme les kinés, les sages-femmes, les médecins généralistes ou médecins du sport peuvent démystifier l’incontinence urinaire d’effort et orienter les patients vers des spécialistes comme les gynécologues, les urologues ou kiné uro afin de trouver le traitement approprié.
Est-ce que ce type de problème est genré ?
Un gros oui et un petit non.
Non, car les hommes peuvent également souffrir d’incontinence urinaire, mais c’est plus rare. La nicotine présente dans le tabac augmente l’instabilité de la vessie chez l’homme, comme chez la femme. Le surpoids présent chez l’homme comme la femme augmente également la pression intra-abdominale.
Oui, car l’anatomie du bassin de la femme comprend 3 orifices (anus, méat urinaire et vagin) alors que celui de l’homme 2 orifices.
Oui, car la grossesse est le principal facteur épidémiologique de l’incontinence urinaire. C’est-à-dire que l’accouchement peut fragiliser les muscles du plancher pelvien.
Oui, car la perte de masse musculaire du corps en général, et donc aussi du plancher pelvien, est majorée chez la femme lors de la ménopause. En effet, la ménopause entraine une chute des œstrogènes chez la femme alors que l’homme n’a pas de chute de son équivalent masculin, la testostérone.
Ce problème, on n’en parle pas souvent. Pourquoi selon vous ?
Les symptômes liés à la sphère intime de la femme, comme les symptômes liés aux pertes d’urines et des selles chez les filles comme chez les garçons, sont en général considérés comme honteux et cachés
C’est dommage, car à tout problème, il y a souvent une solution. Mais pour savoir qu’il y a un problème, il faut savoir qu’il existe et pouvoir en parler !